Résumés > Yannis POLYZOS_L'installation programmée des quartiers réfugiés dans l’agglomération athénienne. Formation urbaine et espace bâti.

Yannis Polyzos

Professeur émérite, Ecole d’Architecture d’Athènes

L’arrivée des réfugiés d'Asie Mineure marque une étape cruciale dans l’évolution sociale et économique de la Grèce de l'entre deux guerres et reste une étape clé pour comprendre et interpréter les phases successives qu'a connu son espace urbain et bâti. Ce cas limite d'urbanisation, que représente leur installation « programmée », décide définitivement du rôle de « capitale en instance » qu’était Athènes jusqu'alors, la conforte finalement comme pole unique et prédominant sur tout l'espace national. Une métropole du sud est méditerranéen souvent décrite comme hypertrophiée : un grec sur quarte y vivait, un sur trois actuellement.

Au même moment, la formation sociétale grecque passe de l’ère rurale à l’ère urbaine sans transition, l'espace se désarticule en trois secteurs inégaux qui s’enchevêtrent : la ville traditionnelle ou vieille ville, la ville moderne et la ville des réfugiés. Cette triplicité va progressivement s'estomper et est de moins en moins visible puisque s'y ajoute la ville des migrants économiques. La dynamique ascendante des classes moyennes qui s’ensuit, et qui va de jusqu’ à la fin des années '90, conduit à une relative homogénéité de l’espace urbain des grandes villes grecques. Seuls les quartiers réfugiés gardent encore des signes visibles d'une structure sociale et spatiale spécifique.

De nos jours, ce paradoxe tout relatif est mis en cause. L’adoption en 2014 du schéma d’aménagement du Grand Athènes qui, entre autres, adoptait le principe d’un bi-pole Athènes Centre-le Pire comme outil d’une nouvelle centralité à cote d’une dynamique de fortes restructurations spatiales intra-muros, est contesté. Une politique d’investissements intensifs tire la métropole vers le sud, ou une « ville nouvelle » est créé, ainsi que vers l’est où est prévu le nouveau centre administratif. Le centre-ville quant à lui démographiquement s’effondre, perd son grand atout qu’est sa multifonctionnalité urbaine diachronique au bénéfice d’un tertiaire touristique envahissant.